J'aime l'ambiance qui traîne dans la ville de Clermont. Assis sur un bloc de pierre de Volvic, sur les abords de la place Jaude, j'attendais patiemment que Fab revienne de ses explorations dans les boutiques avoisinantes, soldes obligent. Un chaud soleil de printemps me réchauffait le visage et je laissais faire ce moindre mal, ressourçant ainsi physiquement et moralement un organisme bien mis à l'épreuve durant un mois de décembre pénible. La place grouillait de monde, Vercingétorix du haut de sa statue, bien campé sur sa monture brandissait toujours fièrement le drapeau de L'ASM, et ce depuis la victoire de Mai dernier. Détail sur lequel les autorités ont bien voulu fermer les yeux. Un peu plus loin une manifestation contre les mesures totalitaires de notre gouvernement animait dans une humeur bon-enfant ce début d'après-midi à l'ambiance printanière. Dans un autre coin de la place un duo de musiciens boliviens ajoutait sa note de gaieté à ce joyeux mélange de badauds souriants. J'observais tranquillement ce spectacle étonnant fait de mariage de couleurs, de cultures, de générations et je me sentais libre. Totalement libre. Entre deux édifices, le Puy de Dôme pointait son nez dans un ciel d'un bleu pur, écrasant de sa masse rocailleuse et grise en cette saison, la ville qui se lovait paisiblement à ses pieds. Il semblait lui signifier sa puissance passée. Oui, je me sens bien dans cette ville. Certains la trouvent un peu bourgeoise, c'est qu'ils ne connaissent pas les autres de cette grandeur. Moi je la trouve fidèle à la fonction qu'elle occupe dans cette région. Il n'est jamais facile d'être chef. Sans doute la noirceur des pierres de ses bâtiments me rappelle-t-elle la grisaille de nos villes ouvrières du Nord. C'est une ville qui a une âme. On ne peut rester insensible à son histoire. Construite au sein même d'un volcan éclaté, on en ressent le magnétisme inquiétant au détour de chaque rue sombre et froide que le soleil ne peut atteindre. Et parfois je pose la main sur cette pierre rugueuse et dure, au pied d'une cathédrale noire et massive, vaisseau fantôme surplombant la cité dans un voyage à travers les siècles, témoin spectrale du courage des hommes et de leur lutte pour la Vie. Fab m'a sorti de mes pensées, doucement, sachant qu'il ne faut jamais trop me brusquer dans ces moments de pur enchantement.
Quel beau texte.
Rédigé par : Lili Gertrudis | vendredi 21 janvier 2011 à 20H07