VU DU BALCON : ARCHIVES

Je perds un peu le fil de l’écriture. Pourtant il y a tellement de chose à dire, exprimer, extraire de notre petite cervelle. J’en étais resté à ce spectacle que je n’ai pas été voir, faute de n’avoir pas eu le temps d’aller chercher les places. Mais soyons sincère, quand on veut on peut, et se servir de fausses excuses ne sert à rien. Depuis que nous sommes ici en fait, nous n’avons jamais pris la peine de nous déplacer pour passer quelques heures dans une salle de spectacle, que ce soit ciné, musique, théâtre ou autre. Pourtant ce n’est pas les occasions qui manquent et étant situés pas très loin de Clermont nous avons la possibilité de choisir parmi un large panel de spectacles en tout genre, cette grande agglomération, même si elle souffre encore des a-priori qui ont longtemps terni son image, est une ville dynamique et intéressante. (à savoir : élue ville la plus rock de France en 2010…). Donc voilà, nous n’avons pas beaucoup bougé en ce qui concerne ce sujet, contrairement aux sorties touristiques à travers le département. En ce qui concerne cette longue rédaction de cette tranche de Vie, je me demande si je ne commence pas à me lasser un peu de sa forme et si, secrètement, je n’ai pas envie de lui donner une trame plus romancée, plus explicative, plus approfondie. Quitter un peu ce témoignage journalier qui, après toutes ces années, n’a plus la constance et la naïveté des débuts. Pour soulager un peu ces écrits, je me suis inscrit sur Facebook, ce qui a débouché sur une communication plus personnelle avec des amis du Nord ou comme moi expatriés depuis bien plus longtemps aux quatre coins de France.

Nous voilà donc aux portes de notre quatrième hiver ici, et, malgré une arrière saison chaude et agréable (27° la semaine dernière, 6 aujourd’hui !), les mauvais jours qui approchent ne me rassurent pas. C’est la première année d’ailleurs que je les appréhendent autant, j’en ai déjà fait état. Je parle de plus en plus de soleil, de Sud, de tranquillité, me demandant souvent si cette soif de repos recherchée ici a été assouvie. Ils annoncent à la météo les premiers flocons à 800m, et ça ne me fait pas rire du tout.

Le camion a débouché du virage à pleine vitesse. Emporté par son inertie, il a traversé la ligne médiane mais dans un dernier sursaut, le chauffeur coupable a réussi à rétablir la course du mastodonte. Je n’ai même pas eu peur, j‘en ai même souri. J’ai pensé à cette voiture que je suivais quelques minutes auparavant, et à sa lenteur énervante. Le papy avait bien du mal à choisir sa route et je ne lui en voulais pas. Grâce à cette patience inestimable j’ai laissé un tragique fait divers au placard. Je pourrai donc ce soir regarder les bleus nouveaux, en savourant une petite bière, à la santé de Madame Lachance. Aurait-elle des choses à se faire pardonner ?

Nous sommes quand même drôlement fait. Je suis toujours étonné de reconnaître que nos humeurs, nos états d’âme, notre façon de percevoir les choses peuvent évoluer au fil du temps suivant les ambiances dans lesquelles nous vivons. Je me souviens avoir écrit plusieurs notes au sujet de mon désamour pour un auteur que j’avais beaucoup lu, Philippe Djian  (37.2 le matin), ne retrouvant pas au travers de ses lignes le rythme et le style parfois un peu déstabilisant qui m’avaient totalement transporté à une certaine époque. Plusieurs livres achetés et laissés de côté avaient fait naître le doute dans mon esprit et, me narguant depuis plusieurs années sur l’étagère, et moi étant à court de lecture, je me suis dit essayons pour voir. Et voilà ti pas  que j’entame mon second sur la semaine, me payant même le culot de reprendre une histoire là où je l’avais laissée, et me replongeant aussi sec au milieu des personnages, comme si rien ne s’était produit, comme si le temps ne s’était jamais arrêté voici plus de quatre ans. Alors, n’y a-t-il que les imbéciles….vous connaissez la suite. Coïncidence étrange encore une fois, car notre héros du jour passe avec son acolyte Stéphane Eicher pour un concert littéraire à Riom la semaine prochaine. Mais cela je ne l’ai su que Samedi. Alors ira, ira pas Alain ? Est-ce qu’un smicard peut se payer une heure de bon temps à plus de 20€ ? Le débat est lancé.

Ce qu’il y a de surprenant avec les insomnies c’est qu’elles remettent totalement en question la notion de temps. Je m’en suis aperçu cette nuit en me réveillant vers 2h30. Pensant qu’une demie-heure venait de s’écouler, j’ai vu au réveil : 4h. Puis une demie-heure plus tard : 5h. Je me suis rendormi et c’est le bruit de l’eau qui m’a réveillé, une heure après, vers 8h. J’ai ouvert doucement la porte de la salle de bain et Fab du dentifrice plein les lèvres m’a dit « Fait voir ta tête… » J’ai feint une mine de malade, toussotant, enroué mais devant son air découragé je me suis vite repris. Tout allait bien ce matin, le soleil cognait sur mes bouquins par une petite lucarne. J’ai ouvert le store  pour mieux savourer ce ciel d’Est  bleu azur. Cette image me manquera quand nous ne serons plus ici.  Après le petit dèj je suis parti avec le chien vers les collines que j’aime traverser en automne pour mieux admirer l’alignement des volcans qui nous entourent. Les couleurs d’automne ne sont pas encore au rendez-vous, mais cela ne saurait plus tarder. Je me suis arrêté pour mieux profiter de cette douce matinée et j’ai regardé ces trois volcans, quatre en fait, qui nous tiennent compagnie, fidèles et protecteurs. Le Puy de la Nugère qui a fournit du travail aux hommes de la région pour l'extraction de la fameuse pierre de Volvic, durant des siècles et encore aujourd’hui. Là a été découvert la non moins fameuse eau de Volvic grâce à laquelle les chinois connaissent l’Auvergne. C’est également sur ses pentes que, lors de notre première balade, nous nous sommes bel et bien perdus. Juste à ses côtés, si on se situe sur le même plan, Les Puys de Jume et de la Coquille , qui, de l’endroit d’où on les observe, forment comme un énorme volcan strombolien, mais qui en fait sont bien distincts l’un de l’autre. Puis à droite, le Puy de Louchadière, que nous n’avons pas encore gravi et qui propage ses eaux jusqu’à 150 km de ses sources dit-on. Je regarde ces trois frères parfois longuement, sans jamais me lasser du spectacle, trouvant ces lignes harmonieuses et voluptueuses. Au loin j’entends les hommes se mettre au travail dans cette matinée d’automne presque estivale. Les marteaux cognent, les tronçonneuses coupent, les tondeuses font ronfler les moteurs et Pyrus s’impatiente à mes pieds. Tout ça est à moi. «  Je suis riche de ça, et ça ne s’achète pas » Mais qui c’est qui chantait cette chanson ? ah oui, j’y suis…ouffff.