Ma belle-mère, je n’aime pas ce mot, est revenue passer quelques jours avec nous dans sa région natale. Une occasion pour elle de revoir ses filles, son frère, sa sœur. Drôle de destin également que celui de cette femme qui a quitté sa terre natale voici près de cinquante ans, pour suivre l’homme qu’elle aimait et ne jamais revenir y vivre. Je n’ose imaginer sa réaction lorsqu’elle a fait connaissance avec ce pays en pleine convalescence, pauvre et délabré (la guerre n’était pas loin), le Nord d’alors était bien moins accueillant qu’il peut l’être aujourd’hui. Il lui a fallu beaucoup d’amour et de courage pour s’adapter à un environnement totalement différent de ces charmants villages d’Auvergne qui avaient bercé sa jeunesse. Mais elle a tenu bon. De ce mariage naquit quatre filles et deux garçons. Deux de ces filles sont installées ici depuis plusieurs années et avec nous, c’est encore un peu de cette descendance qui revient à la source. Je me suis souvent demandé comment cette mère vivait ce retour vers les origines opéré par ces filles. Mais revenir dans cette région, pour elle il n’en est pas question. Toute sa vie est là-haut, dans le Nord. Elle vit seule ces séparations que la vie lui a soumis logiquement, et parfois de manière brutale. Notre fils Nicolas est le seul lien de la famille vivant à ses côtés, mais s’il décide de venir nous rejoindre, ce sera un vide de plus à combler. Pourtant, elle ne se plaint pas de ces éloignements successifs. J’ai parfois l‘impression, devant ce silence qui n’est pas de la résignation mais une force communicative, que la vie de cette mère n’aura jamais de fin. Qu’elle continuera durant des années à voir partir et revenir les êtres qu’elle aime, leur communiquant cette force d’espérance nécessaire à toute évolution de l’individu pour vivre serein et libre. Pas de compte à rendre. Pas de leçon à recevoir. C’est la Vie qui œuvre pour nous. C’est l’enseignement que je tire des silences évocateurs de…la mère de ma femme.
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