Samedi.
Par contre y’a des lendemains qui déchantent. Célibataire une fois de plus, ma moitié étant remontée dans le Nord finir un déménagement commencé il y a deux ans et demi, je m’étais préparé un week-end tout en mouvement et recueillement. Pour le mouvement, le vélo était prêt, le circuit à définir, mais la météo en a décidé autrement. Du moins pour ce samedi. Reste la marche avec le chien qui commence déjà à couiner au bas de l’escalier. Il me faut juste un peu de courage pour lever mon séant de ce fauteuil et me mettre en route pour une bonne balade dans la froide grisaille qui, ici a 800m, me rappellera sans doute les petits matins humides du Nord. Prenons le temps de décider. Pour le recueillement, le mot est fort, je le sais, j’ai un peu de lecture en provision( « Les états d’âme » de Christophe André, un livre passionnant, pas compliqué, niveau CAP/BEP( mon niveau d'étude), qui me rassure sur ce que j’ai pu entreprendre…je vous le conseille), j’ai aussi le blog et les notes mises à jour, qui me feront réfléchir parfois un sourire aux lèvres, parfois bouche béate, parfois sans expression, parfois pas du tout . Et puis le repos va prendre une bonne place durant ces trois jours de solitude. Les nuits ne sont pas terribles en ce moment, les réveils nombreux, les ré endormissements rares. Voilà donc la trame de ce week-end prolongé qui s’annonce. Et pour vous prouver ma bonne foi, je vais de ce pas ouvrir un bouquin de randos Chemina et décider d’un parcours pas trop difficile. Pour la suite on verra.
Je me suis mis en route sous une faible pluie, en passant dans les sous-bois, le long d’un étang où, patiemment et assidûment, deux pêcheurs chatouillaient le poisson. Les odeurs de terre mouillée bien spécifiques à ce type d’étendue d’eau, m’ont tout de suite ramené à des souvenirs d’enfance, et aux parties de pêches dans les brouillards matinaux, au bord d’un étang d’une région réputée de l’Avesnois. La mémoire ne résiste pas aux odeurs, petits animaux que nous sommes, parfois l’envie de se laisser guider par nos sens instinctifs nous procure bien du plaisir. Je me suis un peu attardé sur les berges humides de l’étang puis j'ai repris ma route . Mon idée était de ne pas faire une rando trop difficile, mais j’avais opté pour un parcours qui attirait ma curiosité depuis un bon moment. J’allais donc parcourir la vallée des Prades, et 3h30 de marche m’attendaient. Le chien, malgré ses dix ans était en pleine forme, une trentaine de mètres devant moi, comme à son habitude. Pour m’aider, un bâton fin mais robuste, acheté au buron du Puy Mary il y a cela de très nombreuses années, faisait l’affaire. Il y a des objets que l’on aime et que l’on garde pour ce qu’ils comportent de souvenirs et de sentiments. Pourvu que ce modeste bout de bois dure, c’est tout ce que je lui demande, au sens propre comme au figuré. Je suis arrivé à proximité du château de Chazeron, magnifique et ancienne bâtisse qui protège aujourd’hui un centre scientifique, et qui a retenu enfermé quelques personnalités politiques durant les premiers mois de la défaite de 40, sous les ordres du maréchal nous voilà. Je n’ai pas d’avis sur la question. J’ai continué mon chemin, certain que je repasserai un autre jour pour une visite plus longue. Il pleuvait toujours un peu mais ce léger crachin ne gênait en rien cette marche qui n’était pas de tout repos, à cause des dénivelés rencontrés. Parfois je m’arrêtais sur des points de vue, qui par temps clair, auraient sans doute été superbes. Après avoir franchi cette première difficulté le parcours m’a fait redescendre vers la vallée à travers les bois, dénivelé assez dangereux par ce temps humide, puis après avoir traversé le ruisseau qui courrait dans le fond de la vallée, sans doute pour aller se jeter plus loin dans l’étang de mon point de départ, j’ai gravi de nouveau les pentes abruptes qui allaient me mener vers le point culminant de cette rando. La musique sur les oreilles, à bas niveau pour ne pas occulter tous les bruits de la nature, me faisait oublier les difficultés de ce parcours. Le chien, lui, était déjà bien crotté, mais ne ressentait aucune fatigue. Nous avons cheminé ainsi jusqu’au sommet d’un mont appelé « Le Roc Errant ». Un modeste banc de bois au pied d’un petit calvaire à la réalisation un peu curieuse et dérangeante, érigé en 1777, nous accueillit pour une pause bien méritée. Déjà deux heures et demie de marche. Il ne pleuvait plus, très loin vers l’Ouest, j’apercevais la ligne significative des vieux volcans qui me signifiait notre lieu de vie, et devant moi s’étendait la plaine de Limagne. Il n’y avait que nous et le silence. Je me suis senti plonger dans un passé très lointain et j’ai imaginé la vie des populations d’alors. J’ai partagé quelques biscuits avec le chien, le faisant boire dans le creux de mes mains puis nous nous sommes remis en route, de nouveau vers le fond de la vallée où nous sommes arrivés une heure plus tard. Les deux pêcheurs n’avaient pas bougé, l’un en face de l’autre, chacun sur sa berge. Comme pour se faire une conversation silencieuse, ou se lancer un défit amical. Ils étaient bien. Nous aussi. Dimanche.
Sur le soir, après avoir englouti une bonne portion de spaghettis pour me maintenir sur le vélo demain, j’ai offert au chien une promenade digestive, pour m’excuser du manque d’activité de la journée, et, une fois de plus, à soixante-dix ans, il m’en a mis plein la vue. Etonnant quand même. Je prévois pour la suite une bonne lecture et un coucher assez précoce. Comme le sera sans doute le lever. J’aime me lever tôt. Ce sont les mauvaises nuits que j’appréhende. On verra.
Lundi
C’est toujours comme ça. Quand le chien devine que pour la prochaine sortie, c’est le vélo que j’emmènerai, il ne fait pas de manières, il me tourne le dos, et se met en boule dans son panier. Je prends mon peti-dèj ainsi, en l’observant, mais il ne se retourne pas, comme pour me donner mauvaise conscience. Quand c’est l’inverse, le vélo lui, il dit rien.
Je suis parti vers 7h30, au travers un brouillard épais et tenace. C’est terrible de rouler ainsi, sur des routes de montagnes dont on ne sait pas deviner le pourcentage de pente, ni fixer le point ultime de la côte, pour mieux gérer son effort. Il faut marcher au moral, attendre que le pédalage se fasse plus souple pour soulager l’effort que l’on pense parfois inutile. Une demie-heure de route plus tard, l’envie de faire demi-tour m’a traversé l’esprit, Mais une longue descente vers Pontgibaud et ensuite un long plat de 8km m’ont totalement enlevé l’idée de la tête. Cette sortie m’a souvent rappelé une rando effectuée dans les pyrénnées, lorsque, parti à 4h du matin dans un crachin épais, j’avais galéré de manière infernale pour arriver au sommet du premier col, Le Marie Blanque, sans pouvoir apprécier un mètre carré de paysage. Je me souviens de ces cloches de vaches que j’entendais sans pouvoir situer leurs propriétaires. Sacrés souvenirs…
J’ai rencontré, en passant dans un petit hameau où de nombreux artisans avaient leur atelier, un peintre sur roche volcanique, un Picard, installé depuis 16 ans dans la région. Certains choix de vie qui me surprenaient auparavant, ne m’étonnent plus aujourd’hui. Ils témoignent d’une liberté que nous avons et dont nous occultons les finalités, mais toujours sont riches d’enseignements.
Rentré vers midi, j’ai terminé les spaghettis d’hier soir, et après la douche, je me suis endormi dans une sieste profonde et récupératrice.
Ce soir, après avoir déchargé meubles et cartons en tout genre, je vais essayer de trouver un sommeil réparateur pour attaquer la semaine qui s’avance, content de m’être donné les moyens de faire de ce week-end mal commencé, une suite de satisfactions, fatigantes certes, mais tellement enrichissantes. Merci au chien et au vélo…
merci d'avoir déposé un post sur cette petite note... heureusement, les choses se sont arrangées ; le petit a prit son envol... grâce à l'un de mes clients (et à maman bien sùr !) qui avait un studio meublé à louer. Chance pour toute la famille, les relations sont meilleures et je me prends moins la tête... Lui, il est heureux, il vit sa vie, mais tous les midis, il vient manger chez ses parents !
Votre blog très sympa et courage pour le déménagement !
Isabelle
Rédigé par : ISABELLE | lundi 13 avril 2009 à 09H41