Je regardais simplement la télévision quand la première marche de l’escalier a craqué. J’ai d’abord pensé au claquement produit, sous l’effet de la chaleur, d’une vieille menuiserie, comme on peut l’entendre parfois dans les maisons un peu humides que l’on réchauffe après une période d’absence plus ou moins longue. Mais ce craquement n’avait rien à voir avec ce phénomène. Cet escalier de bois, pratiquement neuf, avait vraiment craqué. Comme soumis à un poids assez lourd et soudain. J’étais seul et plongé dans la semi-obscurité, seul l’écran de télévision diffusait un faible halo de lumière dans la pièce. Je me suis tendu, ramenant mes genoux sous le menton, les ceinturant pour me donner une contenance et me rassurer de ces idées stupides. J’ai tout de suite penser à Eux, oubliant les images diffusées sur l’écran. Et j’ai ressentis ce frisson qui ne me quitta plus jusqu’au coucher. Une onde glacée qui prenait son origine dans le haut du dos, à hauteur des épaules pour se diffuser jusqu’au sommet du crâne. Mais je reviens à ce moment à la fois fou et réel ou l’espace d’une seconde j’ai pensé avoir la visite d’êtres venus rompre une solitude lourde et pénible. Mais écrire inquiète. Dire inquiète. Avouer inquiète. Pourtant…Ce week-end je me suis occupé à transférer des films sur le Pc. Images de fêtes de famille d’il y a quelques années. J’ai vu mes fils rirent et s’amuser sans avoir à l’esprit qu’ils n’étaient plus de ce monde. J’ai souri en les observant, sans que jamais l’ombre d’une peine ne se réveille. J’étais bien. Heureux de les voir devant moi. Il ne s’était rien passé, Ils étaient quelque part, je ne sais pas où et allaient revenir un de ces jours, sans prévenir. Une fois ce travail terminé, je me suis interrogé sur mes sentiments et j’ai compris que cette peine de l’absence est bien un abîme personnel dans lequel on plonge à l’abri des regards, qui nous prend à des moments où on s’y attend le moins et qui provoque en nous un flot de larmes difficilement évitable. Une photo, un film nous rassure sur l’amour que nous portons à l’être disparu ou absent, simplement. Nous ne devons pas avoir peur de notre conscience quand elle nous porte à imaginer de faux sentiments. La Vérité de notre Amour, est unique et nous sommes seuls à en connaître la valeur. J’ai donc passé la soirée avec cette échine glacée, attendant l’improbable, l’inconcevable, écoutant chaque son de cette maison comme des signes d’éventuels visiteurs. Et je crois que j’avais peur au fond. Peur que cela arrive et de n’être pas à la hauteur de la situation. Envie de leur parler, d’entendre le son de leur voix d’enfant. Envie de toucher, de serrer. Et je me suis rappelé ces bruits sourds qui me réveillaient dans mon sommeil, un peu avant que les drames ne surviennent. Etait-ce l’instinct qui, logiquement, me prévenait du danger à venir ? Nous savons aujourd’hui que nous possédons tous une intuition, plus ou moins développée. Alors je continuerai à agir comme ce soir, racontant des événements qui paraîtront dérangeants et qui inquièteront. Mais l’Invisible et l’Absence me permettent de marcher sur une route qui me ramènera vers Eux. Les grincements de portes, les craquements de toutes sortes, les souffles chauds ou froids sont autant d ‘indicateurs que je veux bien suivre, un frisson dans le dos. La peur au ventre. Il viendra bien assez vite le jour où je ne croirai plus en moi.
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