J'étais tranquille, j'étais pénard…Je coupais tranquillement ma pomme en quartiers réguliers, soigneusement épluchés, sitôt qu'un était terminé, je le dégustais avec avidité, quand on se contente de peu, la moindre bouchée a des allures de festin. Je prenais ma pose et profitais du silence du réfectoire, désert à cette heure de la nuit. Sur la table quelques restes de saucisson fromage, pâté peut-être d'alouette, Guillaume, Guillaumette, chacun en mangera et Guillaume restera. 3 litrons de rouge, vides. Sans étiquettes. De ce vin d'auvergne qui vient d'obtenir l'appellation d'origine contrôlée on se demande bien par qui. Le petit vieux est entré, avec ses allures d'Astérix, s'est dirigé vers le saucisson, m'a dit je t'empreinte ton couteau sans que j'ai eu le temps de dire ouf s'en est coupé un bout et l'a enfourné dans son gosier lèchant avec délice mon couteau dont le goût de pomme ne l'avait apparemment pas gêné. J'ai regardé mon couteau. Puis j'ai regardé le quartier de pomme qu'il me restait à éplucher. J'ai regardé l'heure. Ca faisait dix minutes que j'étais là. Les autres sont arrivés. La conversation allait bon train: la météo, les pourris du gouvernement, et les fainéants à qui on donne le RSA SANS LES FAIRE BOSSER. Astérix a dit: Plutôt que de les assister on devrait les abattre. Je me suis revu dix ans en arrière dans le bus nous conduisant à un match de foot à Lens. Ces supporters sang et or c'est les Lillois qu'ils voulaient exterminer. Sarajevo à côté c'était une partie de plaisir. Je regardais toujours mon quartier de pomme qui commençait à jaunir lamentablement. Je pensais au jeune qui m'avait dit en m'envoyant manger: prend ton temps!
VERIDIQUE: j'ai eu envie de prendre mon chlas et de faire un massacre à la hauteur de mon âme d'indien qu'on m'a dit que j'avais il y a trente longues années. C'était un tout petit couteau, un peu ébréché, apparemment il était pas le seul, et il sentait le saucisson. Je l'ai passé sous l'eau, et doucement je l'ai essuyé devant Astérix qui se demandait pourquoi je prenais tant de soins à faire briller cette lame. Puis j'ai englouti le dernier quartier de pomme, avec ses pesticides. Me voyant arriver dans l'atelier, le jeune m'a dit : déjà!
Haaaaa oui !
Il y a des moments dans la vie, comme ça ou tout peut basculer... pourrait basculer...
Des instants où la limite est tellement fragile...
Heureusement il y avait le dernier quartier de pomme...
Sourire...
Rédigé par : Account Deleted | vendredi 16 septembre 2011 à 20H35