Qu’il est difficile d’aimer…mais il est encore plus difficile d’accepter la mort de l’amour. Cela vaut aussi bien pour les Hommes que pour ce qui fait leur Vie. Toute leur Vie. On pense s’éloigner simplement et un jour on s’aperçoit que plus rien ne nous lie. Chaque regard sur les choses qui nous ont fait nous laisse indifférent, hagard, si bête que l’on en vient à se détester soi-même. Je suis sorti de la maison avec au fond de moi cette angoisse que je sentais monter depuis plusieurs jours. Il ne faisait pas froid, simplement humide, une humidité qui me pénétrait à chaque pas, chaque fois que je relevais les yeux. C’était une matinée d’automne avec un soleil bas, comme honteux de se trouver là pour réchauffer cette terre qui a tant souffert. J’ai relevé le col de ma veste, plongé mes mains dans les poches, et j’ai avancé tête basse dans ces rues qui m’ont vu grandir. Inquiet, je relevais le front de temps à autre pour vaincre ma lâcheté, pour mieux affronter la pénible réalité. Sur le pont qui enjambe la voie ferrée j’ai regardé ces lignes parallèles rouillées, noyées sous une végétation envahissante, signe d’abandon et de future destruction. Elles ne mènent plus nulle part, se perdent dans un avenir sacrifié sur l’autel du profit. Plus de travail, plus d’homme, plus de mouvement. De cette hauteur je me suis tourné vers les autres voies de communication en contre-bas, rivière inutile, autoroute bruyante et inachevée, voies parallèles qui m’avaient valu une bonne note pour un devoir de rédaction à l’école. Elles m’interpellaient déjà ces voies de communication qui traversaient la petite ville encore riche à cette époque. Les péniches ne passent plus, plus de travail, plus d’homme, plus de mouvement. J’ai continué mon chemin vers la rue de mon enfance, celle où les souvenirs sont encore précis. Là, je me suis cassé la jambe, là le boulanger était le meilleur du pays, là ont riait au milieu de trottoirs sales et puants…il ne reste que les trottoirs, toujours aussi sales, toujours puants, rien n’a changé, la rue a tout simplement été oubliée, manque de travail, manque d’hommes, manque de mouvement. Jadis victime du manque de modernité elle souffre aujourd’hui du manque de tout. La misère d’après guerre est revenue sournoisement, en paix avec elle-même. Elle respire aux quatre coins des rues, souriant cyniquement aux gens qui feignent de l’ignorer. Je suis rentré de cette courte errance dans le passé, anéanti. Il faut savoir refuser un combat, accepter ses défaites, ses manques, ses fuites. Il faut penser à vivre, pour que vive le monde. Accepter le désamour. Les murs qui m’ont protégé me libèrent aujourd’hui et je profite de cette fortune pour savourer mon éloignement. Seul, le vin qui a coulé lors de retrouvailles trop courtes a pu me faire oublier le vide qui habite aujourd’hui les rues de mon vieux pays.
ces une petite partie de ma vie ,que je vois dans ce texte, je pense a vous car ont ne peut remplacer ce qu'on à perdu
Rédigé par : pilaete jean- michel | mercredi 03 novembre 2010 à 15H26
Et non, bien souvent les choses (ou les hommes) ne changent pas, et c'est notre regard sur elles (et sur eux) qui change...
On en vient à ne plus aimer ce que pourtant on avait porté dans son coeur...
L'inverse est aussi vrai... sourire...
Ha, l'Homme, cette énigme ! ! !
Beau texte, lucide, tendre, profond, et, juste....
:o)
Merci pour le partage...
Rédigé par : Petite Voix | mercredi 03 novembre 2010 à 19H28