Je ne sais pas si j’en ai déjà parlé. Nous n’écoutons plus assez de musique. Nous avons passé notre adolescence dans les frasques innovantes et débridées des 70’s, mêlant nos sentiments aux morceaux bien souvent incompris des groupes de rock aussi talentueux qu’éphémères. Nous étions surpris à chaque naissance et faisions de ces découvertes musicales la phylosophie de notre future vie. Peu importaient les messages, s’il y en avait, c’est avant tout la réjouissance qui nous portait et nous donnait l’envie de nous projeter dans un futur dont l’horizon, petit à petit, s’embrumait, un peu trop rapidement. Les 80’s apportèrent avec elles les mariages, les concubinages, les séparations indispensables à la vie d’adulte. J’ai longtemps voulu perpétuer cette adolescence et, au travers d’une vie de famille que je voulais comme bon nombre d’amis, « différente », j’ai fait de la musique notre support spirituel, notre système de défense sans que cela en devienne une religion. C’était d’ailleurs l’erreur à ne pas commettre. Etre mélomane ne veut pas dire aspirer à une quelconque divinité, quel qu’en soit le prix. Bref, à la maison il y avait toujours, à faible volume, une mélodie qui courait dans l’espace. Nous avions une voiture musicale qui ne ressemblait pas à un juke-box à roulettes ou à une discothèque ambulante comme on en entend souvent déambuler dans nos rues aujourd’hui. Bien sûr, de temps en temps, on montait le volume et les enfants, petits à cette époque, nous faisaient bien comprendre que nous n’étions PAS SEULS AU MONDE. Ils ont vu leur père chanteur de rock puis DJ à trois balles se lever le dimanche à des heures un peu tardives et, pas rassasié de ces tonnes de décibels rabâchées semaines après semaines, combler cet espace familial d’une musique reposante et motivante. Cela a duré. 80’s, 90’s…20 ans de vie de famille en musique. Sans en imposer, au rythme des envies de chacun mais sans jamais sombrer dans l’intolérance. Des débats stériles, des moqueries, des échanges bénéfiques il y en a eu. Cette même musique nous a fait supporter, voir oublier, cet horizon dont la brume était soudainement devenue une épaisse et noirâtre fumée noire vers laquelle nous ne tournions jamais la tête, mais qui nous surpris un jour de canicule, nous enveloppant dans un linceul d’amertume et de doute. La musique a quitté ce foyer douillet dans lequel elle avait fait sa place depuis plus de vingt ans. Je me rends compte qu’elle avait pourtant sa place et que sa force était tout aussi importante que les paroles chaleureuses et sincères qui nous ont été offertes. Et des silences compatissants et timides. Mais nous avons, j’ai, car je me rends compte de ma responsabilité dans cet oubli involontairement calculé, occulté cette force qui nous avait fait tels que nous sommes toujours aujourd’hui. Il suffit pourtant d’une simple pression sur un bouton. Ou d’un simple « clic ». C’est tellement plus simple maintenant, qu’on en oublie l’essentiel.
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