Lorsque les enfants grandissent, presque naturellement, ils demandent l’objet qui leur permettra de connaître de nouvelles sensations, dans un état autre que celui qu’ils connaissent depuis leur naissance. Un vélo. Aller plus loin, plus vite sur une drôle de mécanique qui « tient toute seule »…Nous parents, nous sautons sur l’occasion qui nous est donnée pour enfin passer à autre chose dans notre difficile devoir d’éducation. Après le traditionnel vélo à roulettes, viennent les angoisses de l’apprentissage de l’équilibre sur cette mince couche de caoutchouc. Nous ne sommes pas tous des ingénieurs en herbe, ni de fins pédagogues sortis des grandes écoles et il faut s’adapter à ce métier d’instructeur en parfait autodidacte. Pour notre part cette instruction fut source de bien des interrogations. Je me souviens de l’achat des vélos pour les deux plus grands des enfants. Nicolas opta pour un vélo plus tape à l’œil qu’efficace et Damien pour un vélo type demi-course, se foutant pas mal de l’effet mode des VTT et autres BMX alors en pleine expansion…Dès notre première sortie, je remarquai les efforts anormaux que devait produire Damien dans l’ascension de petites côtes faciles à gravir, mais je ne m’en inquiétais pas plus que ça…je pensais que c’était de la mauvaise volonté, un peu de paresse…Quelques encouragements un peu sévères et la motivation viendrait sûrement. Nous ne savions pas à l’époque, que la maladie se développait lentement. Quand j’y repense aujourd’hui, j’ai l’estomac en compote. A la même époque, Sébastien, plus jeune, demanda à rouler sans roulettes à l’arrière de son petit vélo. Il ne trouva jamais l‘équilibre, issue de la force nécessaire à cet exercice, et malgré les heures assidues que nous avons passé lors d’interminables séances d’essai, il abandonna, sans trop se poser de question. Nous nous disions, toujours dans l’ignorance, que cela viendrait plus tard. Sébastien ne connut donc jamais les joies du vélo. Damien, quant à lui, eu un peu plus tard un second vélo, qu’il utilisa pour ses courts déplacements dans la rue, pour aller voir ses copains. Puis un jour le vélo resta dans la cour, se mit à rouiller, faute d’emploi régulier. Sébastien de son côté, s’acheta les jeux vidéo « cycling manager » et devint un as du management cycliste. Armstrong devint son idole. Damien c’était Ulrich. Nous devions acheter « cycling manager 3 » en récompense du bon bulletin de l’année 2003. C’étai peut-être « cycling manager 2 »,…nous ne savons plus très bien. C’est à tout cela que je pensais en gravissant, seul, relativisant mon effort, le Col de la Moréno ce matin. Et Mon Dieu, que cette solitude est dure à supporter. Et le vélo, aussi léger soit-il, porte le poids de ces souvenirs.
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